mardi 25 novembre 2008

C’est Leya qui a parlé de « Loin de Chandigarh »


Nous étions à un dîner en train de parler avec quelque mesquinerie et bcp d’ironie des rapports de couple et là avec un grand soupir et une mine réjouie, je me souviens qu’elle a lancé « et bien je viens de finir « Loin de Chandigarh » et on a encore bcp à apprendre ». Ainsi donc je ne saurais pas tout des secrets de l’amour ?
Ce livre est tout simplement captivant, il commence comme un postulat pour moi et se referme comme une révélation.

Près de 700 pages pour suivre le cheminement amoureux d’un homme follement épris qui s’aperçoit que tout énamouré qu’il soit de sa femme il s’est trompé sur la nature de ses sentiments à son égard. L’histoire d’un homme rationnel qui renonce à ce qu’il aime par-dessus pour partager la passion d’une femme morte depuis plus de 60 ans.

Cet homme accède pourtant à ce que beaucoup nommerait la ‘félicité domestique’ à savoir l’amour fusionnel, cette extase qui dépasse l’entente physique et font que les mots deviennent superflus. La majeure partie des gens passent leur vie à l’attendre. Lui décide de passer outre au nom d’un impératif complètement irrationnel qui dépasse le cartésien qu’il se targue d’être. Ce choix l’amènera à re-considérer toute sa vie et sa chance.

Ce livre déborde de sensualité liée à la fois au caractère passionné et libre des protagonistes mais également au cadre de cet ouvrage : l’Inde. L’Inde n’est pas essentielle à l’histoire mais en devient indissociable, elle n’est pas un prétexte à l’histoire mais un cadre attachant.

Car une des surprises de ce livre pour moi était le ton de récit, une telle liberté chez un auteur (et narrateur) indien m’étonnait. Tous deux se sont délestés de la moralité inhérente aux religions, aux coutumes qui freine toute passion et porte un jugement très critique sur les actes de chair. Le ton est donné dès la première page.
Comme Rohinton Mistry dans son « Equilibre des mondes », Tarun J Tejpal porte un regard lucide et critique sur son pays : les superstitions, la place de la femme, le système de caste, la corruption, l’héritage colonial, les violences ethniques….

L’Inde n’est présentée avec les clichés habituels de grande spiritualité, de détachement matériel ou encore comme un cadre exotique propice à la luxure. L’Inde y est décrit comme le reste rationnellement avec un attachement propres aux racines, au quotidien : la nourriture, la maison et la jungle dans les contreforts de l’Himalaya, la faune et la flore, les personnages picaresques comme Taphen et Rakshas.

Ce récit est moderne, intimiste et en même temps très romanesque. L’auteur réussit à nous conter sans mièvrerie d’une très belle histoire d’amour.